Ethique des soins en gériatrie

ETHIQUE REFLEXION ET PRATIQUES EN GERIATRIE

Elisabeth Penlaë-Flochlay

Psychologue institutionnelle

le 10/07/2011 06:15:00 

Premier principe éthique :

Les résidants ne nous appartiennent pas, même perdus dans leur mémoire, leurs douleurs, leur identité, ils n’appartiennent qu’à eux-mêmes, s’ils ont besoin

d’aide, ils n’ont pas besoin que leurs proches ou les soignants disposent d’eux.

Première réflexion éthique :

Est-ce que j’aimerais vivre en tant que résidant dans l’institution que ma profession contribue à créer ?

L’éthique dans le soin c’est d’abord une réflexion et une interlocution. C’est ensuite une position et une décision où celui qui est le plus fragile le plus en danger sera aussi le plus respecté.

 

Ethos. : Signifie les coutumes, les usages, les moeurs du groupe d’appartenance.

Ethiki : signifie ce qui est conforme aux usages et aux moeurs du clan, mais à cette conformité s’ajoute la dimension morale.

C’est donc une notion qui s’enracine dans la culture et les valeurs du groupe humain.

La notion de groupe est essentielle pour reconnaitre, ou non la valeur de conformité de tel geste, tel acte, telle parole en référence à une culture

commune. Lorsqu’on parle d’éthique on évoque donc une attitude de groupe par rapport à une situation. Dire que l’on a une éthique personnelle, n’a pas de sens ne serait-ce qu’au regard de l’étymologie du mot.

ETUDE DE CAS

Un monsieur qui ne meurt pas.

Patient en fin de vie, mais cette fin de vie au-delà de toute attente dure, deux semaines, un mois, deux mois, le patient n’est plus qu’esquarres. L’équipe est traumatisée par les soins quotidiens, la souffrance infligée malgré les morphiniques.

Tous les matins son fils appelle pour savoir comment s’est passé la nuit… bien ?

L’épouse qui n’en peut plus de cette « attente de la mort » la souhaite de plus en plus fort.

Un patient qui survit dans des conditions terribles.

La situation est reprise en équipe, avec la Cadre de Santé, et le médecin.

La présence quotidienne du fils qui à force de prolonger des gestes et des

attentions permanentes qui n’ont plus aucun sens dans le cas de ce patient. Le fils est dans le déni total de la finalité de la vie de son père.

Le médecin rencontre ce fils.

Ce monsieur parle longuement de son père et des relations qu’il a eu avec lui et qu’il veut maintenir.

Le dialogue s’oriente, vers la position du fils envers la fin de vie de ce patient.

Il est question du sens de cette vie encore là.

Le médecin demande au fils, de « laisser son père partir »,car celui-ci est suspendu au désir fou « d’éternité » du fils, le père est le seul et dernier rempart générationnel qui protège le fils dans son propre statut d’enfant, d’être « le fils de » ce père. Il faut faire comprendre au fils que ce statut est éternel, puisque la vie ne l’est pas.

La fille  médecin d’une résidante qui est en fin de vie, non douloureuse.

La patiente refuse toute alimentation, tout médicament ; la fille demande la pose une sonde gastrique et des investigations. Le médecin de l’établissement opte par contre pour des soins de confort. Cette fille s’oppose à l’option du médecin.

Cette fille qui avoue que pour un de ses patients elle a opté pour la même position que le médecin de l’établissement mais que pour sa mère elle ne peut pas.

La fille demande : « nourrissez ma mère ». Faites la vivre. Au décours d’un entretien avec cette fille, en présence du médecin, de l’infirmière et d’uneaide soignante nous entendons qu’en tant que médecin elle aurait opté pour la position du médecin d’établissement, mais qu’en tant que fille, elle nepeut le faire.

On voit là toute l’ambivalence de la question – éthique du médecin et éthique de la fille)

Sous jacent à cette attitude, il y a un rapport difficile avec son propre frère, l’enfant préféré de la mère, mais qui est aussi le grand absent. Cette fille se

sent dans une position ou en tant que médecin (dit-elle) elle « doit prouver qu’elle a tout fait pour sa mère»..

J’ai demandé à la fille, ce qu’elle pensait être l’essentiel pour sa mère. Celle-ci refuse toute nourriture, alors de quoi peut-on nourrir quelqu’un qui refuse de manger ?

Est-ce que la technique médicale (la sonde, les examens complémentaires vont venir remplacer ce dont sa mère à besoin ?

« De quoi pensez-vous que votre mère a besoin de se nourrir ? »

Stéphane Joumey

Rédacteur 

Rédaction soignantenehpad.fr

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