Bonjour à tous et à toutes,
Je suis ravi(e) de vous présenter aujourd'hui un sujet souvent tabou mais ô combien crucial : la vie affective et sexuelle des personnes âgées en EHPAD.
Le désir ne meurt pas avec l'âge, et heureusement ! Pourtant, ce sujet dérange encore beaucoup, y compris parmi les familles et les soignants.
Il semble donc important de décrypter l’évolution de la sexualité chez les personnes âgées, pour savoir comment se positionner en tant que soignant.
Aujourd'hui, nous allons ensemble briser les tabous et mieux comprendre et se poser les questions suivantes:
1- La vie affective est-elle encore possible en EHPAD?
2- Quels sont les effets du vieillissement sur la vie sexuelle ?
3- Quelle intimité pour les résidents ?
4-Comprendre le désir sexuel chez un résident atteint d’une maladie démentielle ?
5-Que doivent, que peuvent faire les soignants ?
6- Que dire à la famille ?
1- la vie affective est-elle encore possible en EHPAD?
Les besoins sexuels ne disparaissent pas au fil des ans : ils diminuent, en intensité ou en fréquence, mais peuvent s’exprimer à tout âge... même très avancé.
"La sexualité peut exister jusqu’au bout de la vie. C’est quelque chose de tout à fait normal, qui manifeste que la pulsion de vie est encore présente. Ce qui est plutôt positif", car la vie continue en EHPAD.
2- Quels sont les effets du vieillissement sur la vie sexuelle ?
8% des résidents en EHPAD aux Etats-Unis seraient sexuellement actifs. En France, il n'y a pas encore de chiffres précis, mais il est certain que la réalité est similaire.
Pas facile cependant pour ces résidents de vivre une sexualité épanouie dans une institution. Les besoins sexuels des personnes âgées viennent bousculer les images que chacun, y compris parmi les soignants, se forge de la vieillesse. Les différentes manifestations de leur sexualité (relation de couple, hétérosexuelle ou homosexuelle, masturbation) posent donc souvent problème au personnel qui ne sait pas comment réagir et manque de formation sur la question
A savoir que l'’âge ne gomme ni le désir, ni l’envie de plaire. Il n’est donc pas rare qu’en établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), des relations se nouent entre résidants, que des sentiments naissent et se concrétisent par un rapprochement physique.
Une situation parfois délicate à gérer pour le personnel. Plutôt que de la nier, il faut en parler ouvertement. et lever les préjugés. Oui, un homme de 80 ans peut encore avoir une érection, et une femme du même âge une libido débordante. Même s’il arrive fréquemment que la maladie ou la fatigue des résidents freinent, voire empêchent la sexualité. C’est le cas notamment pour les personnes qui souffrent de cancer de la prostate, ou de diabète.
Comme les difficultés physiques et cognitives : car le vieillissement peut entraîner une diminution de la libido, des troubles de l'érection ou de la pénétration, et des problèmes de consentement
3- Quelle intimité pour les résidents ?
Pourtant, vivre sa sexualité en EHPAD n'est pas toujours simple. Les résidents font face à de nombreux défis :
Le manque d'intimité par exemple : les chambres individuelles sont la norme, et les espaces communs ne sont pas toujours propices à l'expression de la vie affective.
Cette absence de "lit conjugal" pousse parfois les résidents à utiliser les parties communes pour leurs retrouvailles, au risque de choquer l’entourage, les autres résidents ou le personnel. "Mais ils n’ont pas d’autres choix".
Le droit à l’intimité dans les Ehpad est rappelé noir sur blanc dans la charte des droits et liberté de la personne âgée dépendante. Cette intimité qui inclut la sexualité.
L’article 4 dispose qu’une personne âgée « doit être protégée des actions visant à la séparer d’un tiers avec qui, de façon mutuellement consentie, elle entretient ou souhaite avoir une relation intime. » Le personnel n’a donc pas le droit de s’y opposer et doit même tout faire pour défendre leur intimité.
Une obligation qui se heurte souvent aux contraintes médicales et organisationnelles dans les Ehpad. En effet, pour des raisons de sécurité par exemple, les résidants ne disposent pas toujours des clés pour fermer leurs chambres .
Pour éviter ce type de situation inconfortable, il faut préserver au maximum les espaces privés comme les chambres: frapper à la porte et attendre la réponse avant de pénétrer dans la pièce. Et même, quand l’organisation du service le permet, aménager des chambres doubles. « Regrouper deux lits dans une seule pièce n’est pas toujours techniquement possible, notamment quand il s’agit de lits médicalisés
4- Comment comprendre le désir sexuel chez un résident atteint d’une maladie démentielle ?
"On voit de plus en plus de nouveaux couples dans les maisons de retraite, et même si la plupart se forment sur le mode de l'amitié et de l'affection, il faut leur laisser la liberté d'avoir des activités sexuelles s'ils le souhaitent et si tout s'y prête",
Mais les choses ne sont pas toujours simples, "Lorsqu'il ne s'agit pas d'un couple constitué mais de personnes qui ne se connaissent pas très bien, le personnel peut se demander ce qui peut se passer, est-ce que l'activité affective sera normale, est ce que la personne qui consent va consentir tout le temps, ou est-ce qu'elle va être forcée par la force physique du partenaire masculin?".
Selon une étude australienne , les risques physiques restent pourtant minimes, avec un taux d'abus sexuels infime (0,3%) dans les établissements accueillant des malades atteints d'Alzheimer, contre 2 à 4 % pour les autres types de violences physique notamment
Protéger les résidants
Une difficulté pourtant surgit lorsque l’un des deux partenaires est atteint de maladie d’Alzheimer ou d’un trouble apparenté. "Rien ne permet d’affirmer que ces malades ont du désir, mais rien ne permet non plus d’affirmer qu’ils n’en ont plus. Nous touchons là à un droit de tout être humain". Lorsque se noue une relation entre une personne "lucide" et une personne malade, l’équipe doit alors évaluer si cette relation est subie ou non, si elle a ou non des répercussions néfastes. Une tâche ardue qui demande respect et délicatesse.
La sexualité est un droit acquis pour les personnes accueillies, à condition que les relations soient consenties par les deux parties. Et la question de l’accord mutuel pose parfois des problèmes, notamment lorsqu’un membre du couple n’a plus tout son discernement. Dans ce cas, il faut s’assurer que l’assentiment est réel et non pas forcé. Cela se fait en général par le dialogue, l’observation des comportements (signes non verbeaux comme l'expréssion du visage repli sur soi, réaction agressive au cours de la toilette).
Que doivent ,que peuvent faire les soignants
La question de la vie affective des personnes âgées en établissement doit être évoquée en équipe. Pour trouver le savant dosage entre respect de l’intimité et sécurité des personnes.
Une fois admise l’idée que la vie affective perdure même entre les murs de la maison de retraite, il faut ensuite organiser le service pour la respecter.
IL faut que les soignant crée un climat de bienveillance et d'ouverture : il est important que les résidents se sentent à l'aise pour parler de leur vie affective et sexuelle sans tabou.
Il faut Respecter l'intimité des résidents : cela implique de frapper avant d'entrer dans les chambres, de préserver la confidentialité des informations personnelles, et de permettre aux couples de résidents de disposer d'espaces privés
Pour les cas les plus graves comme les malades d’Alzheimer, il peut être opportun d’informer la personne référente, pour qu’elle donne son avis sur la relation. « En revanche, il n’est pas souhaitable de mêler la famille à la question . Les proches n’ont pas à avoir un quelconque droit de regard sur la relation. C’est à l’établissement de prendre ses responsabilités, pas aux enfants de décider de la sexualité de leurs parents. »
Si un résident présente des comportements sexuels inappropriés qui pourraient mettre en danger les autres, il peut être nécessaire de prendre des mesures pour protéger les autres résidents. Cela peut inclure la séparation des résidents ou la mise en place de supervision supplémentaire.
La maladie d'Alzheimer et d'autres formes de démence peuvent affecter différentes parties du cerveau, y compris celles qui contrôlent le comportement sexuel.
« Il faut savoir poser des limites, surtout quand la sexualité des résidants prend un aspect pathologique: exhibitionnisme, masturbation compulsive... Il arrive également que l’objet de leur désir se porte sur le personnel soignant. Lors de la toilette par exemple, nous sommes parfois confrontées à des réactions gênantes (érections, “mains baladeuses”). Dans ce cas, il faut remettre la distance nécessaire en expliquant clairement au résidant ce que l’on fait: des soins, et non pas des caresses. Dans les cas les plus poussés, il vaut mieux y aller à plusieurs: une personne fait les soins, tandis que l’autre empêche toute velléité d’avoir des gestes déplacés.
Que dire à la famille ?
Les enfants ont toujours beaucoup de difficultés à imaginer l'activité sexuelle de leurs parents. Quand ce sont des parents malades, voire atteints d'Alzheimer, c'est encore pire.
Noter que les patients atteints d'Alzheimer représentent 70% des pensionnaires des maisons de retraite en France
Trop souvent, la famille, et non la personne agée elle-même, devient l’interlocuteur privilégié de l’équipe, même dans les questions liées aux relations intimes. Or, la sexualité des parents ne regarde pas les enfants. Ils n’ont pas à s’en mêler. je développerais la communication avec la famille sur une prochaine vidéo
En Conclusion
La vie affective et sexuelle est une part importante de la vie humaine, et cela ne s'arrête pas à l'entrée en EHPAD. En brisant les tabous, nous pouvons créer un environnement plus respectueux et inclusif, où les personnes âgées peuvent vivre leur sexualité de manière épanouie et consentie.
Il ne faut pas hésiter à Demandez de l'aide : Si vous avez des difficultés à comprendre ou à gérer le comportement sexuel d'un résident, n'hésitez pas à demander de l'aide à un professionnel. Il existe de nombreuses ressources disponibles pour vous aider, notamment des médecins et des psychologues .
Il est important de se rappeler que chaque personne est différente et que la meilleure façon de comprendre le désir sexuel d'un résident est de lui parler directement et de l'écouter attentivement.
J'espère que cette présentation vous a permis d'en savoir plus sur ce sujet important